DES INTÉRÊTS aine, Tout a changé, tout doit changer encore, Raÿnal , Hift. polit. & philof. J. oütës les elpéranGes , toutes les cfâîntes , font attachée! dans ce moment fur le congrès de Raftadt. Le monde entier demande la paix à cette affemblée. Son heureuS génie triomphera enfin de tous les obftacles , des oppofi^ lions 6c des intrigues étrangères : la main pui (Tante de la néceflité fermera le temple de la guerre aux belligérans. iVîais tout ce qu'il y a d'hommes d’état impartiaux ne forme aujourd’hui qu’un vdsu c’eft que ce congrès, de- venu inaccelfible auüt infpirations qui ont allumé la guerre 6c qui agitent tout pour la rallumer encore , pénètre prc* fondément la fituation des affaires , & ne fe fépare pas fans avoir fondé la véritable plaie de l’Europe. Le temps préfent eft plein d’illufions pour les puiiïânCes £ une politique aveugle les arme contre leurs intérêts mêmes i il faut ici jeter devant elles la lueur de quelques vérités 9 afin qu’elles ne s’égarent pas à pourfuivre un objet pour uii autre. Un nouvel état a fuccédé à 1* ancien état de chofes ; tous eft changé fur le continent j les rapports de l’ordre politique ■ - ancien n exiftent plus ; des puîfTances ont difparu , de nouveaux peuples ont pris rang , d’autres ont agrandi l’enceinte de leurs limites 4 la guerre a reflTerré les limites de quelques autres j la moitié du continent £ft d’autres conftuutions & d’autres opinions politiques. Un nouvel équilibre s’eft formé *, Tagrandiffemenc de la Ré- publique françaife 8c la naiftance des Républiques ita- üqués au midi ont rétabli nne balance que la deftruéhon de la Pologne avoir renverfée au nord de l’Europe. Le traite de Campo^Formio Sc les préliminaires de Raftadt ont pôle de nouvelles bornes & achevé de régler les droits 8c les intérêts' des principales puiftances belligérantes. La garan- tie &c la durée de la paix font dans la confolidation de cet ordre de chofes , dans l’état de fatigue 6c d’épuifement ou fix ans d’hoftiiités ont iaifTé l’Europe : après que la cruerre a dévoré deux millions d’hommes , plus de iix milliaTds aux puiilances belligérantes , détruit & coupé le^ fources . les relations commerciales de toutes , quel eft la main du négociateur qui ne tremblerait pas de ligner une nouvelle coalition , ou une continuation d’hoftdirés , qui achèverait de détruire pour un Cède tout ce quil y a de puiffance & de profpétité, & qui ferait l’armement ter- rible d’une moitié du continent contre 1 autre? Quelle puiffance peut compter fur la fortune des combats , & ne trouverait pas fa ruine dans leurs fuccès mêmes ? La guerre républicaine eft le condudeur éledrique des révolutions ; la paix doit être la politique profonde des états, La guerre feroit le délire des cabinets, le chef-d’œuvre des crimes, 8c le triomphe de celui qui s’eft enrichi , qui s ennehiroïc encore de leurs fanglans débats & de leurs épouilles. Négociateurs , vous difputez à la République françaife quelques îles d’un fleuve , & R démolition réciproquement avantageufe de quelques forts -, & un ennemi commun , fous l’annarence de votre sûreté commune , vous enrraine à votre ruine, 8c on vous a enlevé la propriété des mers. Reportez-vous fur cet élément : c eft là que 1 interet général 3 doit rétablir un autre équilibre, fans lequel celui du continent ne feroit qu’une trompeufe chimère, & toute pacification illufoire. Du fond des cabinets où vous traitez la paix , lifez cette infeription fameufe gravée dans Londres : « Ce- » lui qui tient le feeptre des mers, tient le feeptre du » monde ». Voilà le moment d’effacer cette maxime, que l’ambition a confacrée à la tyrannie & à la honte éternelle des pniflances maritimes. Voulez-vous fonder une paix durable , vous que le befoin d’une pacification générale appellera à prononcer fur le fort futur des peuples? Loin de vous cette politique, qui n’a jamais devant les yeux que l’horizon des événemens du jour y n’appartenez ici à au- cune puilfance, à aucun gouvernement, à aucune préven- tion nationale. Un rraité qui doit pacifier le monde dans le préfent & dans l’avenir , ne doit être di&é par aucune paffion , par aucun intérêt contemporains. S’il étoit une nation qui , appelée par fa population & fes moyens, à n’ètre qu’en fécondé ligne dans le fyftême a&uel de l’Europe, & à jouer tin rôle paifible parmi les puillances , fût arrachée de fa place naturelle pour être pouffée par un gouvernement ambitieux dans tous les excès les abus de là domination, une nation qui eût envahi pour elle feule le commerce & les richeffes de toutes les parties du globe ; pofé des poftes militaires fur toutes les mers , fur les principales communications du monde •, affervi la navigation , le fol, les manufactures & les capitaux des autres peuples par fa tyrannie navale , fon fyftême de prohi- bition , fes traités & fes lois commerciales ; dont la poli- tique fût d’agiter le continent j l’intérêt d’y naturalifer la guerre pour s’enrichir dans l'a ruine générale : s’il étoit une nation qui eût reffufeité fur les mers ces tyrans du onzième fiècle , qui du haut de leurs foitereffes , repaires de leur brigandage, opprimoient , dévaftoient les chemins Sc les campagnes, le commerce & les voyageurs ^ ujn gouvernement qui eût fait de l’efclavage de ce fiècle affreux, le fyftême &c rinftrument de fa profpérité dans les colonies,, .. négociateurs. / ch bien! cette nation exifte, ou plutôt ce gouvernement: c’eft l’Angleterre. Parcourez la carte géographique-, il n’eft aucune partie de la terre qui ne foit marquée par une ufur- pation, opprimée par la domination de cette puiifance. Ceft elle qui tient l’entrée des trois mers les plus commerciales du monde ; ia Baltique, par fon influence fur les cabinets du Nord-, la Méditerranée , par Gibraltar; la mer des Indes, par le cap de Bonne-Efpérance. Dans l’Inde , qu’y voyez- vous ? vingt princes fermiers de l’Angleterre : ce vafte pays , non pas exploité comme une propriété , mais dévoré comme une proie. En Europe le Portugal , le Bréfll en Amérique , devenus des colonies anglaifes 8c verfant périodiquement leur or dans la Tamifb ; cet or change dans les mains de Londres en un leyain fatal avec lequel elle entraîne , ébranle le continent -, un aéfce trop célèbre chaflant des ports de l’A/igleterre le commerce 8c les vaifleaux étrangers; la mer fans liberté, la navigation fans droit public maritime; une île feule, l’entrepôt des dépouilles de Tunivers. Négociateurs , prononcez : quel équilibre , quelle paix, quelle profpénté peut efpérer le monde dans cet état de cbofes ? & quel doit être l’intérêt 8c la politique des gau ver- nemens ? doivent'ils le tolérer plus long-temps? Non, il n’y aura de paix, d’équilibre 8c de profpérité, tant que cette épouvantable domination ne recevra ni frein ni limite ; tant qu’on n’aura pas arraché des mains du gouvernement anglais fes moyens d’ufurpation, de corruption 8c de tyrannie ; tant que le Bengale 8c Plndouflan ne feront pas affranchis du joug qui les aflervit 8c les opprime, L’affranchiflement d’un des plus riches marchés du monde eft la caufe du commerce gé- néral , du droit des gens , f intérêt de toutes les puiflances. L’équilibre ne fera rétabli que îorfque lé Portugal repren- dra fa liberté , fa navigation , l’exploitation de fon agricul- ture , de fes manufactures 8ç de fes mines , 8c que quel- que homme d’état, animé du génie de PombaJ , aura brifé les fers de fa panfe, 8c lancé fa nation à l’indépendance, Lorfque Gibraltar 8c le cap de Bgane-Efpérauce rentre- 5 tont fous la domination de leurs poffeffeurs naturels, fËfpagnô & la Hollande : les grands paflages du commerce du monde doivent être libres pour tous les peuples industriels. Les boulevards de la nature doivent Servir à la défenfe des peuples qui habitent leurs fommets , mais ne doivent point être le repaire de la tyrannie. Les caps ne font pas deftinés à opprimer les mers, mais à fervir d’afyle contre les tempêtes ôc les naufrages aux peuples navigateurs. S’il exifte jamais un droit public maritime , c’efl dans les traités que ces vérités doivent être enfin folemnellement proclamées, cûnfignées. Le defpotifme qui pèfe fur le monde entier, ne cef- fera , il ny aura de paix , d’equilibre 8c < de profpériré , que lorfque chaque puiffance , chaque nation, aura repris fes droits 8c la portion que la nature lui a départie dans le domaine général de la propriété & de i’induitrie , la liberté de (on commerce 8c de la navigation : Que lorfqu au Nord le Danemarck 8c la Suède fe réuni- ront pour défendre dans leurs mers leur indépendance po-> lirique ôc commerciale contre la Ruflie 8c l’Angleterre : Lorfque la Hollande, forçant de fesxrifes politiques 8c fe hatant ae recréer fes forces navales , aura reconquis fes an- ciennes poffefiions : Que la Prude j cette barrière importante du Nord depuis la difjparition de la Pologne, aura donné à fa marine tout le dé- veloppement qu’elle peut accjuériraujourd’huiÜans la Baltique, d après la réunion des provinces maritimes de la Pologne à fon territoire : Que lorfque TEfpagne dans le Midi aura commencé à entrevoir fa profpérité dans fa régénération , fa puiffance dans l’énergie quelle eut au temps de Charles- Quint, fa force dans (on alliance avec fes amis naturels: Lorfque les républiques italiques auront refaifi dans le Le- vant & la Méditerranée l’aétiyité induftrieufe 8c le génie com- mercial que leurs peuples déployèrent avant le treizième fiècle : Quand la France enfin, à qui la nature femble avoir donné ta mifiion de maintenir la liberté des mers , aura Des intérêts des puiff. par EfihaJJbriaux aîné . A à i fondé fon fyftème maritime & colonial fur des principes analogues à les vaftes moyens ëc à fa pofition , â l’étendue de fou territoire , ôi repris fur les mers fa place naturelle. Il faut tout dire : il n’y aura de paix 8c d’équilibre que lorfque l’on fehtira cette vérité, que ce font les mers qui exploitent la terre ; que rant qu i! y a oppreffion fur cet élément , il y a opprellion fur l’agriculture', fur le com- merce , fur I mdtiftrie des autres peuples, & qu’il n’y a pins de développement dans leurs facultés induftiielles , plus de richeffes, fans l’entière liberté des mers , ôc que c’eft dans cette liberté que confifte lequihbre politique; Que lorfqu’enfin, par une volonté unanime 8c ferme, toutes les ptiidances aurontdétmit tout fyftème de monopole, d’exclu- fion Hc de prohibition, qui defsèçhe 8: détruit toutes les fources du commerce, qui arme les rivages contre les rivages j les peuples contre les peuples , les gouvernemens contre les gouyernem eus , qui rue dans les entrailles de la terre 8c âu fond des ateliers le germe des produits que l’induftrie libre de l’homme en eût fait fbrtir. On a cherché la caufe de tant de guerres ôc de haines nationales qui ont enfanglanté les mers & le continent. La voila: c’eft elle qui enfanta les guerres â mort que fé firent les Carthaginois & les Romains ; c’eftce fyftème qui infpiroit Han- non , lorfque dans la négociation qui précéda le traité de la première guerre punique, il déclara aux Romains qu’il ne fouftriroit pas feulement qu’ils fe lavaftent les mains dans les mers de Sicile, Il femble que c’eft le génie de Cromwel qui a diécé les ciaufes des premiers traités de Carthage avec Rome. On a dit qu’un conquérant n’impofa aux peuples qu’il avoit vaincus d’autre condition que celle d’abolir les facrifices de fa ng humain. L’affranchi ffement des noirs dans les colo- nies anglaifes doit être suffi une des conditions effentielïes. d’une pacification générale : iâ liberté 8c l’efclavage accollés l’un à l’aurre dans le nouveau mondé , ce monftfnecix af- fémbLigeque le génie de la ciyilifaiion, que la hauteur des 7 lumières <îe ce Cède ne peuvent tolérer plus long- temps, feroit un éternel fujec d'embrafement dans toute l’etendue des co- lonies américaines , de trouble 8c de deftrudion pour le commerce européen ; ces deux élémrens » l’un fortifié par les principes de la France, l’autre nourri dans le coeur de -l'Angleterre par l’efpoir de détruire nos colonies , ne peuvent plus fubfifter enfembie fans produire des exploitons conti- nuelles dans le nouveau continent , <3 c jeter des éclats de guerre dans l’ancien. L’abolicion de i’efclavage doit être la penfée , 1 intérêt même de tous les gouvernemens ; il eft temps que la politique, qui, dans les fiècles éclairés, ne doit être que la juftice , expié, par cet aéTe foîemnel » tous les paétes que la tyrannie 8c la force ont ftipulés contre la nature humaine ; & lorfque tous les peuples par un accord magnanime auront proclamé la liberté des noirs , & re- noncé j en faveur de l’humanité, aux profits d’un trafic in- fâme, ils ne doivent pas permettre qu’un feuî gouvernement élève fa pu i (Tance fur les malheurs; d’une race d’hommes 8c fur l’aiïêr virement d’une des parties du monde. C’eft en vain que la politique angiaife multipliera lesobftacles à cette liberté: fi elle ne l’appelle pas, elle viendra comme la foudre ; elle eft dans le préfent , elle eft dans l’avenir , dans les fsntimens , dans les opinions , dans les progrès a&uels de la civilifation ^ die iera un jour dans les intérêts de routes les puiffances : fi elle eft conoprimée , elle écla- tera, elle fera une révolurion irréfiftibie. Le décret qui a briféles chaînes des efclaves des colonies françaises a retenti dans tome l’Amérique , dans le fond de l’Afrique fauvage 8c fur les bords du Gange : le triple empire de la ftiperfti- tion , du defpotifme 8c de la barbarie , qui a brifé dans ces parties du monde le r effort de l’efprit humain, fera détruit un jour ; la nature & la force de l’opinion feront plus fortes que toutes les infticutions de la tyrannie , 8c que la fcience machiavélique des hommes d’état. Pour ceux qui fui vent la courfe du monde politique , cet avenir eft déjà devant nous; les gouvernemens doivent le préparer par leurs traités : fans 8 cette politique, les événemens viendront au devant des traites , ôc faire ce que ces derniers n’auront ni prévu ni • préparé. Négociateurs , voila des confiderations importantes aux- quelles vous devez vous élever: vous feriez mille traités, fans elles c’eft en vain que vous aurez ftipulé la paix dé votre patrie ôc celle, du monde j la poftérité vous accufeia d avoir manqué de génie , de n’avoir pas vu les affaires de votre fiée le avec allez de profondeur, d’avoir laide le germe de la guerre dans le fein des générations futures. Des écrivains, prenant des defïrs bien légitimes pour la réalité, repre Tentent 1 Angleterre fur le bord d’un abyme où doivent s engloutir fon crédit avec fa puifTance maritime, coloniale ôc commerciale. 111 ufion trompeufe, qui ne peut qu’infpiret une féemiré dangereufe aux autres nations ! La grandeur coîofïale de l’Angleterre eft dans fes moyens ôc dans fon fyfleme politique^ tant que la force ou les traités n’auront point enlevé a cet état de chofes ce qu’il a de nuifîble à la profpéiité ôc â la tranquillité des autres peuples, l’ Angleterre ne ceifera de tourmenter & d enfangîanter le globe. Qu’on ne vienne pas foupçonner la République françaife de vouloir couvrir ici fon agrancufïement ôc des projets d’ambition peut - être , en dévoilant les dangers de la domination an- glaife & démontrant la néceffité de faire rentrer cette puif- fance dans fon ordre naturel. JLong - temps la France, facrifiée à des intérêts étrangers,’ vendue ôc trahie par les minières ôc les intrigues d’une cour corrompue, fans état militaire & fans alliance (i) , a pu refter , (x) b%a puifTance federative d’an peuple eft fondée far un bon état militaire & un bon état de finances: un peuple qui jouit de ce^ double avantage, trouve autant d’alliés qu’il veut. C’eft parce qu’elle n’eut ni état militaire ni finances , que la France a voit perdu, fous les derniers temps delà monarchie, toute confédéra- tion & toute influence au dehors. Elle facrifia, dans fes derniers traites , Tes ahiés les plus fidèles à Tes ennemis naturels. Cette 9 condamnée pendant plus cTun demi-fiècle à une nullité ab* folue , 8c laillcr le champ libre aux entreprifes des cabinets. La révolution a changé fon état politique ; elle ne fait que reprendre aujourd’hui fes moyens , fes droits & fa place na- turelle en Europe. C’eft moins des conquêtes quelle a faites autour d’elle que la reprife de quelques provinces démem- brées de fon antique territoire. Ce n’eft point elle qu’on ac- cufera d’avoir partagé la Pologne , d’avoir envahi la Crimée 8c la mer Noire : elle n’a détrôné pour elle aucune puif- fance ; elle a créé cinq républiques ; elle veut l’indépendance de tous les états, 8c ne fouffrira l’opprefïion d’aucun. Quelle négociation que celle qui fauroit embraffer l’enfemble de tant d’intérêts, 8c les juger fans pallions! Quel plus beau moment de fanétifier le génie de la politique & d’immortalifer le nom des négociateurs! Il n’eft point d’époque dans l’hif- toire des différens des peuples où les négociations aient eu un but aufîi fublime : ce n’eft point une partie du globe, c’eft le monde entier à pacifier ; ce n’eft point quelques îles du Rhin feulement , ce font les intérêts de l’Europe qui doivent entrer dans la balance des négociations. Jufqu’ici les négociateurs n’ont vu que l’intérêt préfent de leurs puif- fances ; l’erifembîe politique, l’avenir, l’intérêt général leur eft échappé. Prefque toutes les guerres qui ont dévoré l’Eu- rope font nées de l’imprévoyance des négociations. Les hof- tilités éteintes par un traité fur une partie de l’Europe, fô rallumoient bientôt fur une autre : la hache de la guerre, qu’une politique heureufe devoir enfouir à cent brades de profondeur, reftoit à la furface , 8c étoit faifie par la puiflance qui avoit conçu le premier mouvement d’ambition , 8c repris la première les moyens de vèngeance. politique, ouvrage d’un miniftère inepte, îa fit defeendre au rang des troifièmes puiffances en influence diplomatique. Je dirai un jour fur quelles bafes & fur quels principes la Ré- publique doit fonder fes alliance», & quels alliés dans l’Europe iî lui importe de s’attacher ; quel doit être enfin fon fyftême politique fous tous tes rapports d’un peuple agricole , commerçant & guerrier» îo Le traité de Weftphalîe a pacifié l’Allemagne; celui des Pyrénées , l’Efpagne & la France ; Riswik, la Hollandes celui d’Aix-la-Chapelle a défarmé pour un moment une , partie des puiflfances de l’Europe; Raftadt va finir de pacifier le continent pour cet inftant\mais les mers , rqais l’avenir, quels feront les traités qui auront la gloire de préparer ce grand ouvrnge ? Aucun jufqu’ici n’a éloigné les fanglantes époques /des différens ; aucun n’a prononcé fur les inté- rêts ôc les deftinées de l’Europe entière : iétonnante révolu- tion qui vient d’ébranler ôc d’étonner le monde doit porter enfin dans tous les cabinets les lumières d’une politique plus agrandie que celle qui a figné jufqu’ici les grandes pacifica- tions. Qu’impofteroit d’éteindre un des foyers de la guerre*, fi les élémens qu’on laifièroit fubfifter encore peuvent repro- duire dans dix ans de nouvelles exploitons ? De grandes vérités politiques, un meilleur ordre, un avenir plus heureux , font encore cachés fous le fombre voile des préventions ^ des haines nationales, de l’ambition & de l’orgueil de quelques hommes d’état. C’eft dans ce moment que ces vérités doivent patoître dans tout leur éclat , ôc aver- tir tous les intérêts ; c’eft à la République françaife qu’il ap- partient de les prononcer pour le bonheur du monde Ôc le lien propre. Heureufe , fi, après avoir pacifié, par fa poli- tique profonde, l’âge préfent ôc les fiècies avenir, fe repofant majeftueufement au milieu de fes alliés dans les limites que lui ont tracées fon génie ôc fa valeur, contente de fes defti- nées de gloire & de puiffance * elle ne parou plus que pour donner l’exemple , non pas de cette politique ambitieufe , l’élément de tous les forfaits, de tous les malheurs des peu- ples , mais de cette politique heureufe où fe trouvent touîes les idée/S Ôc les fentimens de grandeur, de magnanimité, de force ôc de juftiee ! Quel contrafte avec ces puiftances mo- dernes, qui n’ont acquis lèiir domination que par dis crimes, n’ont marché à la grandeur que fur des ruines Ôc à travers le fang des peuples ! Quel contrafte avec ces nations de l’an- tiquité , dont les noms font demeurés célèbres , mais qui ont 11 pks étonné l’univers qu ils ne l’ont rendu heureux , & qur ont pafTé fur la terre avec le bruit de ces rorrens qui vont s’engloutir dans des abymes ! Le philcfophe & le politique peuvent admirer un inftant les décombres de ces antiques états j mais ce n’eft point là qu’ils doivent fouiller pour y trouver des plans de la félicité humaine, un ordre facial coaf- tamment profpère. BAUDOUIN, Imprimeur du Corps législatif * place du Carxousel, n. 66a.